Gestion des subluxations et luxations

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Différence luxation/subluxation

La luxation désigne un déplacement d’une surface articulaire par rapport à une autre ; il s’opère ainsi une rupture de continuité articulaire. Si l’on veut définir simplement la luxation, on peut la décrire comme une articulation qui se « déboîte ». Dans le cas d’une subluxation, la perte de contact n’est pas totale. Ces manifestations peuvent se produire dans presque toutes les articulations, mais certaines sont tout de même plus souvent concernées : épaules, genoux, pouces, chevilles ou articulations temporo-mandibulaires.

A gauche : Luxation (dislocation en anglais)
A droite : Subluxation
(Chopra, EDS Awareness 2017)

Pourquoi des luxations/subluxations ?

Raisons possibles des luxations/subluxations

Dans le SED et les HSD, les tendons et ligaments étant laxes, les articulations sont potentiellement moins stables, d’où une plus grande propension aux subluxations/luxations. Les luxations et subluxations peuvent apparaître avec ou sans traumatisme et peuvent parfois se produire spontanément.
Cependant d’’autres raisons jouent un rôle dans ces événements articulaires :

  • Le tonus musculaire altéré : certains muscles travaillent lorsqu’ils ne devraient pas ou travaillent de manière inappropriée, de façon trop importante, ce qui peut entraîner le glissement de l’articulation. La fatigue musculaire, les spasmes et le stress peuvent également jouer un rôle.
  • La proprioception altérée : elle concerne également la perception de la position articulaire : son altération peut entraîner les subluxations/luxations.
  • Les étirements excessifs répétés :
    Il est indispensable de ne pas répéter les démonstrations d’hyperlaxité (positions étranges des doigts, jambes autour de la tête, etc).
    Ces étirements répétés au-delà de la portée normale ne font qu’exacerber l’hyperlaxité et par là-même le risque de subluxation/luxation :

    “Well, stop — it’s no good for you! Repeated overstretching to that degree will only exacerbate the laxity and the chances of the joints slipping out of place. I’m certainly not saying that you should never do stretches, but I am saying give up the party tricks and don’t stretch your joints way beyond normal range. So please think twice about that career as a contortionist.”

    Parry (2017)

     

  • La forme des surfaces articulaires : certaines personnes peuvent naître avec des anomalies osseuses ou une faible profondeur de douille, ce qui prédispose l’articulation à glisser plus facilement de son emplacement.
  • Le traumatisme : il est la raison la plus fréquente de la subluxation/luxation.

Fréquence

La fréquence des subluxations/luxations varient selon les personnes et même selon les périodes : une ou deux fois par an, une ou deux fois par mois, une fois par semaine, une fois par jour, jusqu’à des dizaines de fois par jour.
Parfois cela semble ne pas s’arrêter.

La gestion est essentielle

Les subluxations et luxations peuvent être douloureuses, irritantes, exaspérantes et handicapantes ; il est cependant possible avec de la patience, des efforts et du temps, que ces luxations/subluxations soient gérées et ne gâchent pas la vie du patient.
La gestion de ces subluxations/luxations est primordiale à la qualité de vie du patient atteint d’un SED/HSD. Chez certains, parfois, l’articulation retrouve son emplacement rapidement, seule. D’autres fois, elle ne revient pas et le patient panique.

La panique provoque un stress et davantage de spasmes musculaires, cela majore la douleur et minore par là-même la chance de réduire la subluxation/luxation.

Parry (2017) souligne que le passage par les urgences est généralement inutile et voué à l’échec. Soit les soignants donneront uniquement un antalgique faible, soit ils iront jusqu’à l’anesthésie générale pour remettre l’articulation en place. Quoiqu’il en soit, les suites seront probablement les mêmes : l’articulation bougera à nouveau sous l’effet des spasmes musculaires toujours présents et le patient revient au point de départ.
Une autre solution souvent proposée est une orthèse / une résine pour tenir l’articulation en place. Ce n’est pas non plus une solution viable puisque l’articulation essaie de se retirer à nouveau alors que l’orthèse la maintient en place de force, ce qui est souvent très douloureux.
Il est nécessaire bien sûr de nuancer selon les cas. Certes, certains patients sont capables de remettre leurs articulations en place seuls, mais lors d’épisodes de luxation franche et profonde, il est parfois impossible de le faire et cela nécessite fréquemment une intervention médicale. Dans ce cas, le professeur Hamonet conseille l’injection de lidocaïne dans les insertions douloureuses pour faciliter la réinsertion ; il insiste également sur l’écoute du patient qui peut guider plus facilement le geste des soignants.

Les principes de la gestion

Six principes-clés doivent être compris afin de gérer au mieux ces épisodes douloureux de subluxations/luxations. Les principaux objectifs sont de rester calme, même au paroxysme de la douleur, et de permettre aux muscles de se détendre. Cela nécessite beaucoup de patience et de pratique.

1. Respirer

Utiliser de lentes respirations profondes. Tenter d’utiliser des techniques de relaxation (différentes techniques peuvent être essayées).
Apprendre à respirer malgré tout, prendre le contrôle de la situation malgré la douleur et la difficulté à rester calme.

2. Prendre des antalgiques

Si vous avez la chance de les supporter, prendre des antalgiques appropriés, selon la prescription du médecin. Ne jamais prendre plus que la posologie indiquée par le prescripteur.

3. Soutenir l’articulation

Trouver une position de repos aussi confortable que possible à l’aide d’oreillers ou d’une écharpe afin de permettre aux muscles de se détendre et de diminuer les spasmes.

4. Essayer la chaleur

Poche chaude, bouillotte, bouteille d’eau chaude, bain chaud, toujours pour aider à détendre les muscles.

5. Se distraire

Malgré la difficulté à occulter la douleur, il est important de tenter de concentrer son attention sur un autre point que cette douleur ou la situation elle-même. Regarder un film, écouter de la musique, parler à des amis ou de la famille, essayer un CD de relaxation. Cette stratégie à court terme peut être utile pour détendre les muscles mais également pour soulager un peu à court terme de la douleur.

6. Un massage doux

Parfois un massage doux autour de l’articulation peut aider à détendre suffisamment les muscles pour être en mesure de déplacer délicatement l’articulation ou même pour qu’elle se remette seule en place.

Et après ?

L’articulation subluxée/luxée peut mettre des heures ou même des jours à reprendre sa place. Cependant, il est improbable que l’articulation s’endommage davantage. Il est donc très important que le sujet garde son calme et patiente.
La consultation est indispensable lorsque le membre commence à changer de couleur en raison d’un manque d’approvisionnement en sang ou lorsque le membre devient complètement engourdi.

Lorsque l’épisode est terminé, une des notions les plus importantes est de réfléchir à celui-ci. Le patient a-t-il effectué un mouvement qui produit habituellement une subluxation/luxation ? A-t-il bougé sans réfléchir ? Quelle était sa posture ? Etait-il excessivement fatigué ? Etait-il particulièrement stressé ? La recherche des déclencheurs est essentielle pour expliquer la subluxation/luxation. Les identifier peut permettre d’espérer pouvoir les éviter dans le futur.

Enfin, la prévention est indispensable !

Il est préférable d’empêcher ces épisodes plutôt que de devoir les gérer tant bien que mal.

Kinésithérapie (pour apprendre à contrôler les muscles autour des articulations), rééducation proprioceptive, port de vêtements compressifs, utilisation d’orthèses si nécessaire, gestion du stress, gestion de la fatigue par la régulation des activités font partie des clés de cette prévention.

Sources
– Chopra 2017 EDS Awareness
– Parry J. 2017. Dislocation/Subluxation Management, or ‘I’m Just Popping out for a while. Retrieved from https://www.ehlers-danlos.com/dislocation-subluxation-management/
– Smith C. 2017. Understanding Hypermobile Ehlers-Danlos Syndrome and Hypermobility Spectrum Disorder. Redcliff-House Publications 2017.
– Hamonet C. Accueil et conduite à tenir face aux personnes avec un syndrome d’Ehlers-Danlos (SED) en situation d’urgence. Risques, incompréhensions et conduites à tenir. Retrieved from http://claude.hamonet.free.fr/fr/art_sed-ursed.htm

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