HSD/SEDh et notion de sévérité

CategoriesSymptômes

Le contexte

La classification révisée des syndromes d’Ehlers-Danlos a été publiée en 2017. Elle décrit les syndromes d’Ehlers-Danlos hypermobiles (SEDh) et le trouble du spectre de l’hypermobilité (HSD). Ce dernier terme, HSD, est appliqué quand aucune autre condition primaire liée à l’hypermobilité n’a été identifiée. Le terme syndrome d’hypermobilité articulaire a par là-même été abandonné.
Voir nos articles ici : L’hypermobilité et les troubles du spectre de l’hypermobilité
et ici : Les critères de diagnostic du SEDh depuis 2017.

Il est important de préciser que ni la classification, ni l’observation en pratique clinique, n’ont jamais eu pour objectif que le HSD soit considéré comme implicitement bénin comparé au SEDh.
Pourtant, un tel mythe est né. Il se retrouve dans les témoignages ou conseils sur les réseaux sociaux, parfois même dans les informations d’une association de patients, et surtout dans les esprits…
L’étude de Copetti et al. permet de préciser la notion de classes de gravité pour les personnes SEDh et HSD.

L’étude

Parlons aujourd’hui de l’article “Severity classes in adults with hypermobile Ehlers–Danlos syndrome/hypermobility spectrum disorders : a pilot study of 105 Italian patients” de Copetti M., Morlino S., Colombi M, Grammatico P, Fontana A, Castori M. (2019).
Le PDF complet de cet article est disponible pour les professionnels de santé (espace professionnel – catégorie Généralités – page 1 ) et pour les adhérents en cliquant ici.

Il s’agit d’une étude menée sur 105 patients italiens dont les diagnostics ont été revus selon les critères de New-York (2017) :
– 58 (55.2%) répondent aux critères de New-York pour un SEDh
– 47 (44.8%) ont été classés comme HSD, c’est-à-dire désordres du spectre de l’hypermobilité.

Un ensemble de 6 questionnaires validés ont été soumis à ces patients afin de les séparer en deux groupes de sévérité : complexes et simples.
Résultats :
– 63 patients ont été classés comme complexes (c’est-à-dire sévères).
– 42 comme simples (c’est-à-dire plus modérés, plus doux)
Ces deux classes de sévérité ne correspondent pas à la distinction entre HSD et SEDh induite par les critères de New-York.

Cette étude indique que les critères de New-York 2017 pour le SEDh sont probablement insuffisants pour séparer les patients en fonction de la gravité de leurs atteintes et de leurs besoins médicaux.

Les troubles affectant principalement l’état de santé et la qualité de vie des patients SEDh et HSD et rendant donc la pathologie plus sévère, sont :

  • la présence de troubles musculo-squelettiques,
  • et surtout la présence également des comorbidités suivantes :
    • fatigue,
    • dysautonomie cardiovasculaire
    • troubles gastro-intestinaux fonctionnels.



De nombreux patients atteints de HSD ou de SEDh présentent une combinaison de ces symptômes et préoccupations. Cependant, un certain nombre d’autres problèmes de santé non explorés dans cette étude sont également reconnus. Ceux-ci comprennent l’anxiété, la migraine, les troubles du sommeil, le dysfonctionnement temporo-mandibulaire et les troubles liés aux allergies ou au syndrome d’activation mastocytaire. Cela ajouterait à la complexité et à la sévérité de la présentation. Les auteurs le reconnaissent.

Seuls les troubles musculosquelettiques sont inclus dans les critères de diagnostic du SEDh (critère 2C). Les autres symptômes ne sont pas des éléments diagnostiques du SEDh.
Cela indique qu’un SEDh diagnostiqué selon New-York peut avoir une qualité de vie moins altérée qu’un HSD. L’inverse est vrai également : un SEDh peut avoir une qualité de vie plus altérée qu’un HSD. Tout dépend de la présence et de la sévérité de la fatigue, de la dysautonomie et des troubles gastro-intestinaux, entre autres.

Ces résultats ajoutent également au débat sur la définition de SEDh /HSD et leur relation avec les comorbidités.
HSD et SEDh sont-ils une même condition et est-ce la raison pour laquelle l’étude identifie des modèles de présentation similaires ? (Hakim A.)
Plutôt qu’une condition hétérogène, un spectre de phénotypes constitue le principe fondamental liant le HSD et le SEDh, il s’agit d’un continuum. Les critères de SEDh mettent en évidence des problèmes spécifiques aux articulations, à la peau, à la morphologie corporelle et à la fragilité des tissus qui sont des caractéristiques essentielles des syndromes d’Ehlers-Danlos. Ces critères tracent inévitablement une ligne quelque part dans le spectre et séparent des groupes phénotypiques, de façon arbitraire. Cependant, la présence de diverses comorbidités dans ce spectre a été prise en compte et intégrée dans le cadre des HSD, il n’est donc pas surprenant que de tels symptômes apparaissent dans les deux groupes.

Ce qu’il faut retenir


  • HSD et SEDh n’ont pas été dissociés par le consortium pour instaurer une notion de sévérité. Le HSD n’est pas un “SED simple” ou un “SED sans complications”. Le SEDh n’est pas obligatoirement plus sévère qu’un HSD.
    Il est important que ces notions erronées et délétères cessent de circuler parmi les patients, notamment sur les réseaux sociaux.

  • Il est de plus en plus souvent demandé par la CNAM que votre diagnostic établi avant 2017 soit revu selon les critères de New-York (malgré les recommandations n’allant pas en ce sens dans les publications internationales). Un nombre certain de patients auparavant diagnostiqués SED hypermobile n’entrant plus dans les cases des critères 2017 de SEDh, votre diagnostic peut parfois être “révisé” par les centres de référence et de compétence en HSD. Cela ne signifie pas que l’on ne prend pas en compte votre souffrance. Cela ne signifie pas que vous souffrez moins qu’un SEDh. Cela ne signifie pas que vous êtes moins atteint. A l’heure actuelle, cela signifie juste que vous ne rentrez pas dans les cases…

  • HSD et SEDh sont deux entités d’un même continuum : le spectre de l’hypermobilité. Les critères de SEDh ont été fixés de manière à créer des groupes phénotypiques homogènes pour favoriser la recherche génétique et clinique. Mais la frontière entre ces deux entités est mince, et est qualifiée d’arbitraire par certains auteurs. Cela est voué à évoluer.

  • HSD et SEDh partagent de nombreuses comorbidités. Il est important d’identifier leur complexité et leur gravité pour établir une prise en charge thérapeutique adaptée.


Nous invitons les professionnels de santé (et les patients les plus intéressés) à aller plus loin en lisant l’éditorial du Dr Alan Hakim au sujet de l’étude de Copetti et al. sur le lien suivant :
https://academic.oup.com/rheumatology/advance-article/doi/10.1093/rheumatology/kez134/5477858.
Pour les moins aguerris d’entres vous, il est possible d’utiliser les traducteurs d’internet.

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